Valorisation des données pour la gestion des sels de voirie

Samedi 15 janvier 2011
Viabilité hivernale
Gestion des sels de voirie
Yves Voirin
Directeur technique
Géoimage Solutions
Goze Bertin Bénié
Président
Géoimage Solutions
Étienne Morin
Président
Vision Météo
Serge Hamel
Cadre conseil - Direction Estrie
Ministère des Transports et de la Mobilité Durable (MTMD)

Des cartes interactives pour la gestion de l’entretien hivernal au Québec

De nombreuses mesures sont collectées dans le cadre des opérations d’entretien hivernal afin d’apporter des modifications sur les pratiques. Ces préoccupations visent à réduire les risques d’accident de la route, mais également les impacts sur l’environnement, ainsi que les coûts d’entretien. Cette approche est de plus en plus considérée dans les organisations routières qui disposent maintenant de moyens technologiques pour avoir une meilleure vue d’ensemble de leurs opérations.

Cependant, les bases de données constituées deviennent rapidement volumineuses et il n’est pas toujours évident d’aller y chercher une information particulière. De plus, toutes ces données sont bien souvent brutes, il est donc nécessaire de les transformer en indicateurs pour les rendre significatives et pour qu’elles puissent réellement permettre de prendre une décision et d’influencer les stratégies d’entretien hivernal.

Le ministère des Transports du Québec (MTQ) utilise un système d’information sur la consommation des matériaux d’épandage pour augmenter l’adhérence sur la chaussée (abrasifs) et pour faire fondre la neige ou la glace (fondants). Bien que l’interface utilisée à l’interne réponde aux besoins des différentes entités régionales, un prototype a été demandé par la Direction du MTQ en Estrie pour mettre en valeur ces données dans une dimension géomatique, en se basant sur le concept de cartes dynamiques maintenant très répandu sur Internet (Web 1.0).

Beaucoup de gestionnaires de réseau routier disposent de logiciels commerciaux qui permettent de produire des cartes. Mais les informations qu’elles fournissent sont dépendantes d’un cercle de personnes expertes dans l’organisation qui maîtrisent les connaissances d’utilisation du logiciel : le produit cartographique n’est donc pas réellement interactif avec les différents types d’utilisateurs qui ne disposent pas des connaissances pour créer des indicateurs ou produire les supports visuels qu’ils recherchent.

Le principe des cartes dynamiques et des tableaux de bord interactifs qui a inspiré le prototype présenté dans cet article se base sur une facilité d’utilisation, sans avoir préalablement suivi de formation, et consiste à permettre à l’utilisateur de trouver l’information qu’il souhaite obtenir en interagissant simultanément avec une carte, un graphique et un tableau. En sélectionnant une partie de l’un de ces trois supports visuels, les deux autres se mettent automatiquement à jour et offrent continuellement une vision sous trois aspects selon les sélections effectuées. L’utilisateur clique sur une région particulière de la carte, le tableau et le graphique indiquent alors les nouvelles données pour la région en question. Si le clic de souris s’effectue sur une partie du graphique, la carte se rafraîchit et indique uniquement la zone concernée par cette partie du graphique, et le tableau ne présente que les valeurs correspondantes. Il est possible alors de partir d’une vue globale pour aller ensuite progressivement dans le détail selon l’intérêt de l’utilisateur. Celui-ci peut alors se concentrer uniquement sur la partie d’information qui retient son attention, en fonction des dates qu’il aura choisies et de l’indicateur qu’il aura sélectionné dans une liste déroulante.

Un outil de géomatique pour le gestionnaire

Le défi actuel de la géomatique est de pouvoir offrir des applications conviviales et simples d’accès à une personne non initiée à la géomatique. L’information spatiale est encore peu utilisée dans certains domaines, car les outils de géomatique nécessitent des logiciels particuliers et une certaine expertise. Les Systèmes d’information géographique (SIG) traditionnels illustrent bien cette constatation, car ce sont des outils faits par des experts pour des experts. Aujourd’hui, nous nous trouvons plutôt dans l’ère des applications réalisées par des experts mais consultables par tous (Web Carto 1.0). La prochaine étape sera le Web Carto 2.0 qui sera l’époque des outils cartographiques réalisés par tout le monde pour tout le monde. L’utilisation des outils de géomatique dans des domaines très diversifiés a été rendue possible grâce aux développements des outils libres. Les initiatives qui existent en géomatique libre font en sorte de démocratiser de plus en plus cette discipline. C’est dans cette tendance que s’inscrit le prototype développé dans cette étude.

Le prototype doit permettre d’assister un gestionnaire dans la gestion des opérations hivernales. Afin de rendre accessible une technologie avancée, comme la géomatique, il est important de comprendre les besoins de l’utilisateur. Les gestionnaires utilisent très souvent des tableaux de bord. Ce genre d’outils compile une série d’informations provenant d’une base de données pour en donner un indicateur (par exemple, un indicateur de risque). Dans la présente étude, plusieurs indicateurs ont été identifiés :

  • Le nombre d’interventions avec sel uniquement ou abrasif uniquement ou un mélange des deux;
  • Le pourcentage de sel comparativement au total du produit épandu;
  • La consommation de sel ou d’abrasif ou de calcium.

Si l’on se place au niveau de la Direction de l’Estrie, on peut noter trois échelles de représentation de l’information : 1) la région, 2) le centre de service et 3) le circuit. Les indicateurs cités auparavant devraient être disponibles pour les trois échelles. Cela permettrait de connaitre les stratégies de mélange qui sont communément utilisées au niveau de la région, ensuite de pouvoir savoir la stratégie généralement appliquée pour un centre et enfin d’obtenir cette information plus précisément au niveau d’un circuit.

Une approche originale et ouverte

Pour mettre en place un outil répondant aux besoins du gestionnaire, nous avons décidé de proposer une application basée sur la géomatique libre. Les technologies libres offrent plusieurs avantages au développeur, notamment la possibilité d’adapter une solution générique existante à un contexte plus spécifique. Les outils libres sont très flexibles et peuvent facilement être modifiés pour un besoin particulier. Quant à l’utilisateur, il dispose d’un outil qu’il peut lui-même modifier et distribuer sans les contraintes de licences.

Pour développer le prototype, les technologies suivantes ont été utilisées :

  • Serveur Apache + MySQL;
  • Librairies PHP 5;
  • Client Web OpenLayers 2.6.

Pour mettre en place un outil qui permettrait la consultation et l’affichage sous la forme de cartes des données de ROH, l’approche proposée consiste à se baser sur un outil Web. L’outil proposé se décompose en trois volets (voir la figure 1) :

  1. La base de données du Registre des opérations hivernales (ROH) et les données à référence spatiale pour la localisation des informations;
  2. Le serveur Web pour la diffusion de l’information;
  3. Le client Web pour la consultation des informations et la navigation.

Ce découpage en trois parties permet facilement de s’adapter à différents cas de figure. Si toutefois la base de données change de structure, il suffit alors de revoir les modules touchant les requêtes sur la base de données (volet 1). Le reste n’est alors pas modifié. Si l’utilisateur désire une nouvelle manière de consulter le système, il suffit de développer un nouveau client (volet 3) sans changer les autres volets. Si l’on veut mettre en place un service web pour accéder aux indicateurs du prototype, on peut alors simplement développer de nouvelles fonctions sur le serveur (volet 2). On remarque clairement que cette approche offre beaucoup de flexibilité et s’adapte facilement aux nouveaux besoins de l’utilisateur.

La figure 1 illustre le principe de fonctionnement du prototype. Dans un premier temps, le gestionnaire indique la période, l’indicateur et l’échelle qu’il désire consulter dans le prototype. À partir de ces paramètres, une requête est envoyée à ROH. La réponse à la requête sera combinée à des informations spatiales (les limites des CS ou les circuits) pour permettre la création de la carte dynamique.

L’utilisateur dispose dans l’interface du résultat de la requête qu’il peut visualiser sous la forme d’une carte mais aussi d’un tableau ou d’un graphe. Il s’agit de la même information qui est représentée sous différentes formes. Cette approche permet au gestionnaire de vérifier le comportement de l’indicateur sur le territoire. De plus, l’avantage majeur du prototype est de conserver la structure de la base de données ROH et de venir simplement se greffer à ROH.

Des perspectives intéressantes

Le développement du prototype a abouti en mars 2010 à une application web permettant la consultation des trois dernières saisons hivernales. La figure 2 présente l’interface de consultation consacrée à l’utilisateur. Une validation de l’application a été faite auprès des chefs d’opération du MTQ de la direction de l’Estrie. Les commentaires ont permis d’observer que l’application répond bien à leurs besoins actuels. La prochaine saison mettra le prototype dans des conditions réelles d’utilisation. À la fin de la saison, une évaluation des résultats permettra de savoir si ce prototype devrait être intégré aux outils de la Direction de l’Estrie. Les technologies utilisées ont été choisies pour qu’un transfert de technologie puisse être fait au sein du MTQ pour une appropriation complète à l’interne.

Le prototype offre un fort potentiel et beaucoup de flexibilité. Il pourrait s’adapter à d’autres problématiques. Il est possible d’imaginer une consultation sur un téléphone intelligent. On parle beaucoup du temps réel. Si effectivement il devenait nécessaire que les gestionnaires puissent avoir accès en tout temps et en tout lieu aux informations de la base de données, il faudrait alors penser à s’orienter vers la mobilité. Par ailleurs, les applications décisionnelles proposent de plus en plus d’intégrer plusieurs sources d’informations permettant ainsi de croiser les informations pour obtenir une analyse plus poussée. Des tests ont été effectués en ce sens en intégrant des informations météo-routières provenant des stations existantes. Il serait donc envisageable de combiner plusieurs sources d’informations dans l’outil (ex. : données véhiculaires, stations météorologiques, etc.).

Sur la toile

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AQTr

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