Plan de transport 2008 : rêve et déploiement de la mobilité durable

Dimanche 21 mars 2010
Mobilité durable
Vieux-Montréal, Place Jacques-Cartier
François Major
Conseiller en aménagement - chef d'équipe
Ville de Montréal

Un bref essai de perspective

Pour accomplir les activités de la vie quotidienne ou pour voyager à travers le monde, les valeurs modernes de mobilité posent le problème des ressources limitées pour se déplacer et de l’empreinte de nos déplacements sur l’environnement.

Dans les villes, milieux de vie de milliards d’individus, la mobilité dépend largement des véhicules à moteur à combustion interne, toujours polluants, et des carburants fossiles, non renouvelables. À Montréal, ville déjà performante en transport en commun à l’échelle nord-américaine, quatre déplacements sur cinq font appel à l’automobile. L’épuisement des ressources non renouvelables sonnera-t-il la fin des villes dans leur forme actuelle ?

Comme organisation complexe d’activités humaines, les métropoles vont pourtant poursuivre leur développement durant les prochaines décennies. Celles qui feront des choix de développement éclairés dureront et verront la qualité de vie de leurs citoyens et des visiteurs s’améliorer.

Que faire concernant les transports ?

Montréal y réfléchissait alors que l’automobile s’était installée en reine au XXe siècle. Le Sommet de Montréal en 2002 a pointé du doigt le besoin d’un effort important de réflexion sur les transports et de focalisation de l’action sous la forme d’un plan de transport. Cet effort est fait depuis juin 2008 avec l’adoption du Plan de transport 2008. Le Plan constitue le cadre de référence incontournable de l’action des vingt prochaines années.

L'élaboration du plan - L'adhésion à une vision

L’élaboration du Plan a permis de développer sur une période de six ans une adhésion forte de la communauté des transports et de la population en général à sa vision des transports, à ses objectifs, à ses politiques, à ses orientations et même aux interventions du Plan et aux chantiers. Le Plan de transport 2008 est ainsi devenu une pièce maitresse de la transformation et du développement durable de Montréal.

La vision et les objectifs

Montréal s’est donné une vision et des objectifs pérennes sur plusieurs décennies et axés sur le développement durable :

« Assurer les besoins de mobilité de tous les Montréalais, en faisant de notre agglomération un endroit agréable à vivre ainsi qu’un pôle économique prospère et respectueux de son environnement. À cet effet, Montréal veut réduire de manière significative la dépendance à l’automobile par des investissements massifs dans les modes de transport collectifs et actifs tels le tramway, le métro, l’autobus performant, le train, le vélo et la marche ainsi que sur des usages mieux adaptés de l’automobile tels le covoiturage, l’autopartage et le taxi. »

Le premier objectif consiste à assurer la mobilité dans les meilleures conditions de temps, de confort, d’accessibilité, de sécurité et de coût. Les quatre autres objectifs concernent les effets sur la vie et sur l’organisation urbaine :

– améliorer la qualité de vie (santé et sécurité) des citoyens, c’est-à-dire réduire l’effet de la circulation automobile dans les quartiers;

– améliorer la qualité de l’environnement, c’est-à-dire réduire les polluants atmosphériques et les gaz à effet de serre, et protéger les milieux naturels;

– soutenir l’économie montréalaise, en proposant un meilleur équilibre entre le transport des marchandises et les milieux de vie;

– planifier conjointement le transport et l’aménagement.

Les dix politiques de transport de Montréal

Le Plan de transport 2008 se décline en dix politiques qui sont les pierres d’assise de la stratégie d’action de Montréal dans le domaine du transport. Elles permettent de regrouper les 250 projets sur 20 ans et les 21 chantiers sur dix ans :

1 - Prioriser le piéton en améliorant les conditions de pratique de la marche

2 - Faire du transport en commun la pierre angulaire du développement de Montréal

Montréal a fixé une cible importante en harmonie avec la Politique québécoise du transport en commun : une augmentation de 8 % de l’achalandage d’ici 2012 et de 26 % d’ici 2021.

3 - Développer les infrastructures cyclables et mettre en place de nouvelles mesures propres à favoriser un usage accru du vélo partout dans la ville

4 - Favoriser les usages collectifs de l’automobile

Montréal reconnaît que l’automobile n’est pas un mode de transport durable et favorise l’autopartage et le covoiturage.;

5 - Assurer le leadership en matière de sécurité des déplacements sur son territoire et adopter la vision « zéro accident »

6 - Partager la voie publique pour accroître la place de la marche, du vélo et du transport en commun

Le partage de la voirie est mis en application dans plusieurs chantiers et projets, par exemple par la mise en oeuvre des pistes cyclables, des voies réservées aux autobus, du BIXI, des piétonnisations de rue et des quartiers verts.

7 - Gérer le stationnement comme un outil stratégique de réduction de l’utilisation de l’automobile

Montréal entend agir sur l’offre de stationnement en réduisant sa place et les avantages qui lui sont associés.

8 - Favoriser les déplacements à vocation économique et le transport des marchandises

Le chantier 19 – Faciliter le transport des marchandises et les déplacements à vocation économique – met en oeuvre des projets comme l’accessibilité à l’aéroport Trudeau, la réglementation de camionnage, la participation aux travaux de la Porte continentale Québec-Ontario et du corridor ferroviaire Montréal-Toronto.

9 - Utiliser les technologies innovatrices les plus performantes en transport

Montréal entend :

– assurer une veille technologique en transport;

– adopter un plan sur les systèmes de transport intelligents (STI);

– implanter une grappe industrielle en transport terrestre avancé;

– contribuer à la mise sur pied de l’Observatoire scientifique et du Forum québécois de la mobilité durable.

10-Maintenir en état le réseau routier municipal

Le Plan prévoit assurer un bon niveau d’effort pour le maintien du réseau. Les projets du chantier 18 – Entretenir et compléter le réseau routier de l’île – devront accorder une place importante au transport en commun et aux modes actifs.

La mise en oeuvre du plan - La mobilisation autour des projets

Organisation de la mise en oeuvre

La mise en oeuvre est un défi qui nécessite qu’une multitude de facteurs techniques, sociopolitiques et financiers soient réunis pour faire avancer chacun des chantiers et des projets. Montréal développe divers outils de suivi afin d’assurer la mise en oeuvre des interventions du Plan conformément à ses objectifs.

Bilan de la première année et demie

Depuis 2008, Montréal et ses partenaires internes (Société de transport de Montréal, Stationnement de Montréal) ont amorcé, avec l’aide de partenaires externes comme le gouvernement du Québec, plusieurs projets, notamment :

– une augmentation impressionnante du service (métro et autobus) de la Société de transport de Montréal (STM), dont trois nouvelles voies réservées pour autobus;

– le prolongement du réseau cyclable;

– le déploiement de BIXI, le système de vélo en libre-service;

– la sécurisation des carrefours et la réduction de la vitesse à 40 km/h sur le réseau routier local;

– la contribution au réaménagement de l’échangeur Dorval et au tronçon Souligny du projet Notre-Dame.

L’ensemble des projets réalisés en 2008 a entraîné des dépenses de 495 M$. Environ 80 % de ces immobilisations ont été consacrés au maintien des actifs (métro notamment, et réseau routier). La part directe de Montréal dans les projets du Plan de transport 2008 représente un montant de 60 M$.

Mentionnons que ces projets ont produit des résultats déjà tangibles et visibles :

– une hausse de 4,1 % de l’achalandage de la STM: 382,5 millions de déplacements en 2008, un record inégalé depuis 1949;

– une part modale en hausse à 36 % vers Montréal et un niveau parmi les plus élevés à 66 % vers le centre-ville;

– le succès immédiat de BIXI avec ses 1 142 000 déplacements en 2009 et ses 10 600 membres;

– la baisse de 13 % des décès sur la route et de 29 % des décès de piétons et de cyclistes.

Effort pour la période 2010-2011-2012

La Ville injectera dans son budget 2010 un montant supplémentaire de 62,2 M$ dans le transport en commun. La contribution totale de 389,6 M$ servira notamment à la modernisation du réseau et à la bonification de l’offre de services.

Montréal et la STM prévoient réaliser dans leur Programme triennal d’immobilisations (PTI) combiné pour la période 2010-2011-2012 des projets liés au Plan de transport 2008 d’une valeur de 1 133 M$. En 2010, 512 M$ seront alloués à des projets liés au Plan. En matière de transport actif, les investissements de 21,4 M$ sur trois ans maintiendraient un rythme de 60 km/ an de nouvelles voies cyclables.

Effort à plus long terme – la mobilisation des partenaires sur les priorités

Plusieurs grands projets du Plan concernent le réseau métropolitain de transport. Leur déploiement nécessite évidemment une forte implication du promoteur et la participation des partenaires impliqués, particulièrement celle du gouvernement du Québec :

– le réseau des trois lignes de tramway (chantier 1);

– la navette aéroportuaire (chantier 2);

– le renouvellement du matériel roulant du métro (chantier 3);

– les prolongements du métro vers l’est et vers le nord-ouest (chantier 4);

– le projet Bonaventure et l’axe Dalhousie (chantier 7);

– le SRB Pie-IX, jusqu’au centre-ville (chantier 8);

– la modernisation de la rue Notre-Dame (chantier 11);

– le train de l’Est (chantier 12);

– le boulevard Cavendish (chantier 18);

– les voies réservées pour le covoiturage sur le réseau routier supérieur.

Le financement de ces projets requiert d’importantes injections de fonds tant au niveau gouvernemental que métropolitain et municipal local. Les investissements prévus dépassent largement la capacité de payer de Montréal et des autres municipalités de la région et nécessitent de nouvelles sources de financement local prélevées à l’échelle régionale, dont :

– une augmentation de la taxe sur l’essence de 13 ¢/L;

– l’imposition d’un péage régional dont le tarif pourrait varier de 1 $ à 8 $ selon les configurations;

– l’augmentation des droits d’immatriculation à 200 $ par automobile et à 400 $ par camion (le droit est actuellement de 30 $).

Le partage à l’échelle régionale d’une vision commune et d’un constat sur le financement devrait faire l’objet d’un consensus établi dans un Forum de discussion régional en vue de développer les solutions de financement des transports, en particulier des transports collectifs et actifs.

La révision du plan de transport 2008

La révision sur un horizon de cinq ans permettra des ajustements aux orientations, aux projets et aux chantiers. Il est improbable que la vision et les objectifs changent, du moins radicalement, étant donné leur caractère de pérennité.

Des efforts plus importants pourraient être nécessaires pour assurer une meilleure réponse aux changements climatiques, aux effets négatifs du transport sur l’environnement et sur la qualité de vie, et à la création d’une économie verte. De plus, la densification et une meilleure intégration fonctionnelle pourraient nécessiter un resserrement des projets de transport et d’aménagement.

Le Plan de transport 2008 constitue le rêve de Montréal pour de meilleurs transports bien intégrés, dans un environnement urbain sain, dans le respect de la qualité de vie du citoyen, en prise directe avec le développement de l’économie. Pour assurer la mise en oeuvre de son Plan, Montréal est en train de se doter des meilleurs outils techniques, sociopolitiques et financiers. À l’aide de ces outils et de la forte adhésion publique à la vision de mobilité du Plan, la mobilisation des parties prenantes autour de la réalisation des projets du Plan est encore plus nécessaire pour faire ensemble de Montréal une métropole durable.

Sur la toile

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AQTr

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