L’élargissement du pont Dominion et de ses approches : un projet, un défi!
Contexte actuel oblige, le pont Dominion, qui enjambe la rivière Chaudière sur la route 132 à Lévis, plus précisément au sud du renommé pont de Québec, fait présentement l’objet de travaux de reconstruction afin de répondre aux normes en vigueur, mais également aux besoins de la population du Québec métropolitain. Récemment, une étude de circulation réalisée sur le territoire de la ville de Lévis a effectivement démontré que le débit de circulation augmente depuis quelques années aux approches des ponts reliant les deux rives. En ce sens, le projet d’élargissement du pont Dominion et de ses approches est né afin de contribuer à l’amélioration de la fluidité dans ce secteur.
Un projet d’envergure
Comme toute chose, le pont Dominion ne peut échapper aux effets du temps. Une inspection réalisée par le ministère des Transports a déterminé que la structure nécessitait des réfections majeures, car la dalle de béton présentait une désagrégation et un délaminage importants de sa surface et la capacité des culées ne répondait plus aux normes d’aujourd’hui. De plus, puisque l’intérêt pour les moyens de transport durable tels que le vélo et le transport en commun est en plein essor, le Ministère a prévu élargir le pont à quatre voies. Un accotement sera réservé aux autobus en direction nord, une piste multifonctionnelle hors chaussée plus sécuritaire sera destinée aux piétons et aux cyclistes. Plus de 35 M$ seront investis dans ce projet d’envergure, dont non moins de 21 M$ pour la saison 2010-2011.
Les étapes se suivent… et se ressemblent
Le coup d’envoi des travaux d’élargissement du pont Dominion et de ses approches a été donné au cours de l’été 2009 et la clôture du chantier est prévue pour le mois de juillet 2011. La première phase a commencé par les travaux d’élargissement de la chaussée et la construction des fondations de la partie est du pont au mois d’août 2009. En janvier 2010, les fondations de la nouvelle structure de la première phase ont été achevées pour ensuite permettre, dès le mois de février, l’érection de la charpente métallique de cette partie. Suivra la coulée de la dalle au mois de juin, laquelle laissera ensuite place à la démolition de l’ancienne structure au cours de l’été. Ce processus reprendra de plus belle puisque tout au long de l’automne 2010, et ce, jusqu’à l’hiver 2011, s’érigera peu à peu la seconde partie du pont, soit la partie ouest. Des travaux sur la chaussée et l’aménagement paysager, qui se tiendront au cours du printemps et de l’été 2011, viendront mettre un terme à cet important chantier.
Tout un pont!
Le pont Dominion est un pont à béquilles en acier dont la portée totale est de 232 m répartie en trois sections, soit 71 m aux extrémités et 90 m pour la portée centrale. Il présente une largeur de 22 m et s’élève à 43 m au-dessus de la rivière Chaudière. Les béquilles de type caisson font 39 m de longueur et servent d’appui aux quatre poutres maitresses.
Quelques exigences du ministère des Transports visant le faible entretien et la facilité d’inspection de la structure ont influencé la conception de la nouvelle structure. Ainsi, le nombre de poutres limité à quatre aura pour effet de diminuer l’entretien, la charpente protégée par un processus de métallisation de surface évitera la corrosion et l’installation de plaques d’acier protectrices devant les éléments stratégiques de la structure les protègera contre les effets nocifs des abrasifs épandus durant l’hiver. Enfin, la structure a été conçue de façon à favoriser l’accès à l’ensemble des pièces et des raccords. De plus, elle disposera d’un système d’éclairage interne pour les béquilles.
Des défis en série
La gestion de la circulation
Tout grand projet routier rime avec défi! L’une des contraintes avec laquelle le Ministère doit négocier depuis le début de ces travaux est sans contredit le maintien de la circulation sur le chantier. En effet, le pont Dominion se situe sur un axe névralgique de la région métropolitaine de Québec et plus particulièrement de la ville de Lévis. Par conséquent, le Ministère n’a pu faire fi de cette réalité et a dû établir un plan de signalisation et de gestion de la circulation solide tenant compte de l’important débit journalier, soit environ 23 500 véhicules quotidiennement et un nombre important de cyclistes. Ainsi, lors de la première phase des travaux, les voies ont été rétrécies et déviées, le marquage retouché ainsi que la signalisation adaptée afin de permettre le maintien sécuritaire de la circulation de tous les usagers en tout temps dans les deux directions (sauf exception). La signalisation sera à nouveau révisée lors de la dernière phase afin de permettre le transfert de la circulation sur la nouvelle structure, soit la partie est.
Un travail minutieux
Un grand jeu de Meccano! Voilà comment peuvent être qualifiées certaines étapes de ce chantier. La géométrie et l’assemblage des pièces principales, qui consistaient en l’ajustement des poutres et des béquilles dans les trois plans, devaient être précis au millimètre près, ce qui est plutôt rare lors de la manipulation de tels mastodontes d’acier. Dans le cas présent, une déviation de cinq millimètres à la base de la béquille correspondait à plus de 25 millimètres au sommet. Ainsi, les trous destinés au boulonnage de la poutre et de la béquille auraient été décalés et donc les deux éléments impossibles à assembler.
Une autre intervention minutieuse sera celle de la démolition de la structure existante durant l’été. Détruire un pont peut sembler simple à première vue, mais lorsque ce dernier se trouve entre le pont d’une voie ferrée et une nouvelle structure fraîchement construite, il en est tout autrement. La démolition devra en ce sens être calculée afin d’assurer l’intégrité de la structure du Canadien National et de celle construite lors de la première phase.
L’hiver
Au Québec, nous avons la chance de bénéficier des plaisirs de l’hiver, saison qui donne toutefois du fil à retordre lorsque vient le temps d’exécuter des travaux sur le réseau routier. Malgré l’hiver 2009-2010 qui fut plutôt clément, le travail sur le terrain n’a pas toujours été de tout repos en raison du froid, de la neige et du vent, très intenses près du fleuve Saint-Laurent et qui rendent la manipulation des pièces d’acier plus ardue.
Qui plus est, la saison hivernale peut prendre le blâme pour d’autres difficultés rencontrées sur ce chantier, car qui dit gel en hiver dit nécessairement dégel au printemps, ce qui ajoute un degré de complexité. Une structure imposante comme le pont Dominion requiert des pièces d’acier tout aussi colossales dont le poids excède la limite permise sur le réseau routier durant la période de dégel. La livraison des immenses poutres d’acier de l’usine vers le chantier devait donc être achevée avant la date butoir. La température cet hiver a cependant contraint le fournisseur à accélérer la planification des livraisons au printemps puisque le début de la période de dégel, normalement prévu à la mi-mars, a été devancé d’une semaine, soit au 8 mars. L’objectif a tout de même été atteint, non sans quelques sueurs froides puisque la dernière pièce a été livrée seulement deux jours avant le début officiel du dégel.
De plus, le risque d’embâcles est omniprésent durant l’hiver et au printemps, sans compter les conditions imprévisibles de la rivière Chaudière qui peuvent surprendre à tout moment.
Environnement
Les travaux de construction du nouveau pont et de démolition de l’ancien nécessitaient l’aménagement d’accès et d’aires de travail en bordure de la rivière Chaudière ainsi que la construction d’un pont temporaire permettant à l’entrepreneur de voyager d’une rive à l’autre du cours d’eau. Ces installations provisoires impliquaient des perturbations de l’habitat du poisson et de milieux humides riverains. Plusieurs mesures d’atténuation de ces impacts, issues de l’évaluation environnementale du projet, ont été ou seront appliquées sur le chantier, notamment une restriction de la période de travaux se déroulant dans l’eau de façon à respecter le cycle de reproduction de l’esturgeon jaune et d’autres espèces présentes, la limitation de la superficie des empiètements en rivière, l’utilisation de pierres de gros calibre pour ces ouvrages, sans oublier la restauration particulière des rives et des habitats à la toute fin des travaux.
L’élargissement de la route à l’approche nord du pont occasionne un rapprochement de celle-ci comparativement aux résidences riveraines. Un écran antibruit d’une longueur de 131 m a donc été conçu afin de réduire les effets de cette proximité sur les maisons voisines. Dans le même ordre d’idées, un programme de suivi et de contrôle du bruit est appliqué par l’entrepreneur, tout au long des travaux.
Des mesures de protection des sites archéologiques situés à proximité du chantier ont également été mises en place. Enfin, des aménagements paysagers conçus pour favoriser l’intégration de la route, des aménagements cyclables et des nouveaux terrassements (coupe de roc et remblais) au cadre visuel de l’entrée de la ville de Lévis seront intégrés au projet.
Cet investissement majeur dans le réseau routier profitera aux milliers d’usagers de la route qui empruntent le pont Dominion chaque jour – automobiles, transport en commun, cyclistes et piétons –, tant sur le plan de leur sécurité que de la fluidité de la circulation. Enfin, ce nouveau pont fera une place notable aux moyens de déplacement verts, tels le transport en commun et le vélo.