Greenroads : un encadrement fiable pour des routes durables

Jeudi 21 mars 2013
Infrastructures de transport, Mobilité durable, Infrastructures de transport
Portique pour la grande faune sur la route 175 sur la rivière Gilbert

L'encadrement et le suivi offerts par le système LEED dans l’industrie du bâtiment permettent aujourd'hui d’attester et de démontrer qu’un ouvrage a été conçu en y intégrant des mesures de développement durable qui favorisent son insertion dans la communauté et dans l’environnement tout en diminuant les coûts d’entretien qui y sont rattachés. Les édifices LEED sont maintenant reconnus par les locataires comme ayant une valeur ajoutée.

Dans le domaine des routes, de nombreuses directives et de meilleures pratiques existent pour diminuer l’impact environnemental et social ainsi que les coûts des infrastructures. De nombreux professionnels à travers la province s’appuient d’ailleurs sur ces savoirs pour réaliser des projets qui respectent les principes du développement durable. Le projet de la route 175 dans le parc des Laurentides entre Québec et Saguenay est un exemple probant de cette prise de conscience.

C’est d’ailleurs afin de faire reconnaître les projets de routes durables ainsi que pour développer, faire évoluer et fixer les standards les plus élevés en matière de durabilité dans les infrastructures de transport que le projet Greenroads a été mis sur pied. Greenroads fut d’abord un projet de recherche, mené de concert par l’Université de l’État de Washington et la firme CH2M HILL, qui a permis de développer la première version d’un système de certification des projets. Greenroads a ensuite pris la forme d’une fondation indépendante qui a mené plus de 120 projets de certification dans plusieurs pays, principalement aux États-Unis.

Comment ça fonctionne?

À l’instar de LEED, le système de Greenroads établit des critères à remplir qui donnent des points au projet. L’objectif est d’atteindre un certain nombre de points pour obtenir une certification. Le système permet d’obtenir un maximum de 118 points et, comme dans le système LEED, il existe différents paliers qui ont des noms différents (certifié = 32 à 42, argent = 43 à 53, or = 54 à 63 et « evergreen » = 64 et +). Les différents points sont distribués dans cinq catégories : environnement et eau (21 points), accessibilité et équité (30 points), activités de construction (14 points), matériaux et ressources (23 points) et techniques de pavage (20 points). On retrouve également un maximum de 10 points qui peuvent être obtenus pour des actions présentant un caractère innovant.

Par contre, le système Greenroads a mis dans une catégorie à part un ensemble de 11 critères obligatoires. Mise en place d’un système de gestion de la qualité, d’un plan de gestion de la pollution et tenue d’analyse de cycle de vie des coûts, pour ne nommer que ceux-ci, ces critères sont davantage des éléments de gestion et de planification que des actions concrètes. Notons qu’ils engendrent bien souvent la mise en place de mesures qui génèrent des points dans les autres sections. Le système considère que ces éléments sont ceux qui relient les projets Greenroads entre eux. Ainsi, un projet qui ne respecterait pas l’un de ces critères incontournables ne pourrait pas être certifié même s’il amassait suffisamment de points par ailleurs.

Pour être certifié, un projet doit donc respecter 11 critères obligatoires et obtenir au moins 32 points parmi les critères volontaires.

L’analyse des coûts sur le cycle de vie ou l’aspect économique

Le système de Greenroads s’appuie fortement sur l’importance de la durabilité des infrastructures et, au centre de cette valeur, on retrouve l’analyse des coûts sur le cycle de vie du projet. C’est-à-dire que l’on doit évaluer l’ensemble des dépenses associées à un projet incluant la construction, l’entretien, la réfection et la gestion de la conception jusqu'à la démolition pour déterminer son coût réel et ainsi comparer les diverses variantes de projet sur cette base.

Nous avons souvent tendance à évaluer les projets en fonction de leur coût de construction sans tenir compte des réparations et de l’entretien qui seront nécessaires. Dans le contexte du développement durable, il est important de considérer les projets qui ont un coût immédiat plus élevé, mais qui permettent de réaliser des économies sur l’ensemble du cycle de vie de celui-ci, ce qui permet de réduire le coût global de l’infrastructure. En ce sens, l’application du système Greenroads lors de la conception et de la construction des infrastructures routières permet de justifier un coût plus élevé pour les infrastructures en étant garant d’une durabilité accrue qui, en finalité, engendre un coût global moindre sur le cycle de vie du projet.

L’accessibilité : un aspect social

Un autre point important pour Greenroads est l’accessibilité des infrastructures. Ces dernières ne doivent pas uniquement servir aux voitures, mais être également à la disposition des vélos, des piétons et du transport en commun. De nombreux points sont donnés pour des critères qui encouragent un développement favorisant l’utilisation de la route par tous les usagers, peu importe leur mode de transport. Bien évidemment, cette notion dépend de chaque contexte : en milieu urbain, les vélos doivent avoir leur place, par exemple, alors qu’un projet d’autoroute devra davantage se concentrer sur l’intégration des voitures et des camions.

Greenroads fait également la promotion des principes du design en fonction du contexte, « Context Sensitive Design », qui est une approche collaborative et interdisciplinaire qui implique toutes les parties prenantes dans le processus de design. Le tout pour s’assurer que le projet préserve, voire améliore, l’esthétisme, l’histoire, la communauté et l’environnement des lieux tout en maintenant la sécurité, la mobilité et la condition des infrastructures. Cette approche, qui intègre l’aspect social du développement durable par la nécessité d’une consultation publique large, est principalement soutenue aux États-Unis par la Federal Highway Administration.

On remarque également que l’aspect esthétique et culturel des constructions revient régulièrement dans les documents de Greenroads. Quelques points sont donnés pour encourager l’intégration de points de vue dans le design des routes, que ce soit par le tracé ou encore par la construction de haltes routières. La promotion de l’aspect culturel se fait par l’installation d’infrastructures informatives dans les haltes routières permettant aux visiteurs de comprendre l’importance des lieux sur le plan archéologique, historique ou culturel. Il est également promu d’allouer une certaine partie du budget à des installations artistiques sur les lieux du projet.

Enfin, l’aspect culturel passe également par la sensibilisation et l’éducation de la population aux enjeux du développement durable qui sont pris en compte dans le projet. La formation du personnel travaillant sur un projet ayant des enjeux environnementaux peut également être incluse dans le volet social du projet.

L’environnement : au cœur des préoccupations

Il est clair que l’aspect environnemental est au cœur du projet Greenroads. D'ailleurs, c’est la dégradation de l’environnement causée par la construction et l’utilisation des routes qui a poussé les penseurs du système à le mettre en place. Par la suite, leur réflexion les a amenés à intégrer les aspects sociaux et économiques au système pour qu’il devienne un réel outil d’intégration du développement durable.

Toutefois, on se rend rapidement compte que la majorité des critères touchent des aspects environnementaux. Une bonne chose en soi, puisque l’intégrité écologique est une source de bien-être social et de revenus économiques non négligeable. Notons que sur les 11 critères obligatoires, cinq touchent directement l’environnement et trois autres y sont directement rattachés.

Les aspects environnementaux couverts se retrouvent dans plusieurs catégories différentes. D'abord, dans celle nommée « environnement et eau » qui touche particulièrement la gestion de l’eau et les habitats naturels. Ensuite, dans la catégorie « activités de construction », qui comprend des éléments reliés à la gestion des émissions atmosphériques et à la gestion des matières résiduelles. Enfin, dans la catégorie « matériaux et ressources », qui porte sur la gestion des matières premières, des matières résiduelles et de l’énergie.

L’aspect de la gestion environnementale est également englobé dans l’ensemble des catégories et particulièrement dans les critères obligatoires qui demandent la préparation de plusieurs plans de gestion relatifs aux principaux aspects environnementaux reliés à la construction d’ouvrages routiers. Il est toutefois spécifié dans les documents qu’une étude d’impact bien ficelée peut servir de base pour l’ensemble des critères si elle aborde tous les sujets mentionnés comme nous le faisons actuellement au Québec.

La simplicité avant tout

L’objectif du système est avant tout de favoriser la simplicité en évitant la rigidité dans l’évaluation des différents critères. Par exemple, dans plusieurs cas, on donne différentes variantes pour démontrer l’atteinte d’un critère donné. On mentionne également que l’atteinte du critère peut être démontrée par « tout autre document pertinent ». En outre, la philosophie générale du système mentionne qu’une bureaucratie minimale doit être nécessaire. On souhaite que les documents existants puissent être suffisants pour démontrer l’atteinte des critères ou que les documents doivent être simples et peu coûteux à produire.

À ce titre, la flexibilité est également inscrite dans la philosophie générale du système, puisqu'en somme il doit permettre de certifier la réfection d’une rue dans un quartier domiciliaire tout comme il peut certifier la construction d’une nouvelle autoroute.

En conclusion

À titre de système de certification, Greenroads est sans contredit celui qui s’impose dans le domaine de la construction des infrastructures routières. La flexibilité et la simplicité de sa structure favorisent son utilisation tout en assurant un haut niveau de qualité et d’intrication du développement durable au projet.

Ce système est maintenant appelé à évoluer en prenant de l’expansion et en s’imposant dans les projets d’infrastructures routières à l’échelle mondiale. Tous les grands donneurs d’ouvrage ainsi que les concepteurs et les constructeurs auront avantage à se familiariser avec cet outil afin d’assurer une plus grande durabilité et une meilleure harmonisation des infrastructures avec le milieu ambiant.

Sources :

  1. www.greenroads.org
  2. Muench, S.T., Anderson, J.L., Hatfield, J.P., Koester, J.R., & Söderlund, M. et al. (2011). Greenroads Manual v1.5. (J.L. Anderson, C.D. Weiland, and S.T. Muench, Eds.). Seattle, WA: University of Washington.

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