Une approche de gestion en viabilité hivernale tirant profit d’un amalgame de solutions innovantes

Samedi 15 janvier 2011
Viabilité hivernale
Camion de déneigement
Serge Hamel
Cadre conseil - Direction Estrie
Ministère des Transports et de la Mobilité Durable (MTMD)

Mise en contexte d’hier à aujourd’hui

Du guide pratique d’entretien d’hiver des années 1970 jusqu’à aujourd’hui, la Direction de l’Estrie du ministère des Transports a mis en place un ensemble de solutions visant à optimiser la capacité d’intervention des équipes d’entretien en conciliant les objectifs de développement durable avec ses obligations découlant de la mission du Ministère à l’égard de la sécurité et de la fluidité du réseau routier. Dès le premier projet, les gestionnaires impliqués ont mis en évidence les gains résultant d’une telle démarche dont :

  • Diminution importante des coûts par un partage optimal des responsabilités et du risque avec ses fournisseurs de service;
  • Meilleure synchronisation des opérations de déneigement et de déglaçage;
  • Optimisation des circuits en fonction des conditions historiques d’intervention;
  • Concentration des interventions aux endroits stratégiques et au moment opportun (concept juste à temps, juste assez);
  • Pratiques plus respectueuses de l’environnement grâce à une utilisation plus efficace des sels de voirie et à la mise en place de nouvelles pratiques (sel préhumidifié, antigivrage).

En plus des gains énoncés ci-dessus, ces projets permettront de relever trois principaux défis du plan stratégique du Ministère, soit :

  1. Consolider les réseaux existants en réponse aux enjeux que constituent la sécurité des usagers et la pérennité des infrastructures de transport;
  2. Optimiser les systèmes de transport en réponse aux enjeux que constitue la desserte des régions et des marchés ainsi que la mobilité en milieu urbain dans un contexte de développement durable;
  3. Moderniser le Ministère pour le rendre plus apte à offrir des services de qualité au meilleur coût.

Ainsi, les connaissances de l’état du réseau routier jumelées aux efforts consentis pour assurer la sécurité et la fluidité offrent une nouvelle source d’informations d’aide à la décision pour les gestionnaires responsables de l’exploitation du réseau routier. Cette façon de faire leur permet de consolider, d’optimiser et de moderniser les modes de gestion dans une perspective de développement durable. Dans le cadre de ces projets, trois principales cibles ont été retenues par les gestionnaires « T O P », soit :

Traçabilité
Optimisation
Prospection

De ces nouveaux modes de gestion résulte une gouvernance en région compétente et innovatrice avec des indicateurs favorisant un meilleur contrôle budgétaire et une gestion efficiente des sels de voirie. L’actualisation de cette nouvelle philosophie de gestion a permis de faire face à ces enjeux au cours de cette année. Des défis organisationnels importants ont été ainsi relevés par ce virage vers la modernité.

Résumé des biens livrables réalisés

Traçabilité

Télémétrie véhiculaire

Afin de favoriser la connaissance du processus de déploiement du parc de véhicules et des opérations requises pour atteindre les niveaux de services prescrits par les normes en vigueur. Le projet de communication véhiculaire de données intègre une architecture technologique conforme aux orientations des architectures des STI. Cette technologie de pointe possède des caractéristiques techniques de robustesse pour résister aux conditions du milieu opérationnel telles que la vibration, l’humidité, les variations climatiques et la corrosion. À aucun moment, la concentration du conducteur n’est sollicitée pour l’utilisation de cette technologie.

La technologie ainsi déployée (voir image plus bas) détecte et positionne en temps réel le début et la fin de chacune des activités de grattage, d’épandage incluant le surdosage « blasts », ainsi que le taux de pose des matériaux réellement appliqué sur la route.

Ces données, incluant la position du véhicule, sont transmises directement au Centre intégré de monitoring (CIM) toutes les 30 secondes.

L’approche de la géomatique pour la gestion de l’information

Pour le projet de communication véhiculaire de données, l’information complète est désormais à deux clics de souris, à deux touches de la téléphonie cellulaire, en temps réel. Le gestionnaire ayant accès à un ensemble d’informations, qu’elles soient véhiculaires, de références, administratives, géographiques, liées aux infrastructures (SIG), événementielles ou météorologiques. Conséquemment, il peut à sa guise, en fonction de la position véhiculaire, créer un contexte de travail (géocollaboration) adapté à la situation (image de l’exploitation en cours) afin de mieux gérer le risque et d’assurer une prise de décision appropriée. L’interface cartographique répond donc à la nécessité d’accéder à une même information géographique, de la partager tant avec le conducteur du véhicule qu’avec l’intervenant terrain ainsi qu’avec le gestionnaire responsable de ce réseau routier. Cette approche géomatique s’inscrit dans une approche de gestion intégrée du territoire.

Le Centre intégré de monitoring

Le Centre intégré de monitoring (CIM) est le centre nerveux vers lequel converge l’ensemble des informations sur le plan régional. Une première entité a été créée pour répondre aux besoins exprimés en matière de veille météorologique, de surveillance météoroutière et de coordination des situations d’urgence.

Deux postes de travail y sont disponibles (voir la figure 1) et chacun dispose de plusieurs écrans pour l’optimisation de la gestion des informations.

Un grand écran panoramique permet d’y placer les fenêtres les plus pertinentes telles que celles des radars météorologiques, de l’interface des stations météoroutières du MTQ, de l’interface de communication véhiculaire de données, ou encore des caméras de surveillance du réseau routier.

L’apport du CIM est stratégique et crucial tout au long du processus de gestion des événements météoroutiers, quelle que soit leur importance. Son intervention se situe à plusieurs niveaux :

  • la veille météoroutière;
  • l’élaboration de stratégies;
  • la gestion des communications;
  • la mobilisation des ressources;
  • la veille des opérations et les ajustements;
  • l’appréciation de l’atteinte des objectifs.

Le CIM est au centre de chacune des actions effectuées sur le réseau routier (Figure 2). Il gère les événements avec recul grâce aux outils dont il dispose pour avoir une perspective globale de l’événement météoroutier et fournit des informations appréciées par le personnel opérationnel confronté aux réalités sur le terrain.

Le suivi météoroutier est effectué pour valider la cohésion des bulletins de prévisions météorologiques et évaluer les impacts des données relevées sur le réseau routier. Ce sont les observations recueillies sur la route et rassemblées au CIM qui procurent une meilleure vision des conditions à très court terme.

Le personnel opérationnel a besoin d’une information très fiable jusqu’à deux heures avant une situation anticipée pour avoir l’opportunité de rassembler ses ressources et de préparer les interventions avant même que les conditions météoroutières ne se dégradent.

La gestion des activités d’entretien hivernal, plus globale, s’arrime à trois axes principaux dans un concept centré sur des services de qualité :

  • la démarche de collecte des informations visant à évaluer et à anticiper les activités d’entretien hivernal;
  • les informations permettant d’élaborer les stratégies, de mettre en œuvre et d’ajuster les activités;
  • les corrections apportées au processus de décision pour l’amélioration des services.

L’optimisation

L’optimisation des circuits

La base de connaissance cumulée à partir des données de télémétries véhiculaires sur plusieurs années (par exemple pendant trois ans) offre de nouvelles perspectives d’exploitation afin d’optimiser la constitution des circuits d’entretien. Il est donc possible de mieux définir les contraintes opérationnelles en compilant l’ensemble des données de télémétrie des opérations réellement effectuées par l’exploitant (régie ou contrat). Ainsi, la représentation cartographique de cette concentration de points met en relief les endroits qui exigent de plus grands efforts d’entretien. Il devient donc facile de partager ces efforts par un découpage plus efficient des circuits.

Des rapports de gestion significatifs

Des rapports préprogrammés sont produits sur demande afin de produire des statistiques opérationnelles pour une période donnée telles que les heures de déplacement (sans activité véhiculaire), les temps de grattage, d’épandage, le taux moyen de pose, la compilation des matériaux appliqués, et ce, selon plusieurs niveaux de forage (par direction territoriale, par centre de services, par circuit, par camion et même par opérateur). Il est aussi possible de visualiser sur une échelle de temps, le graphique du nombre de camions réellement déployés en simultané pour un territoire donné en fonction de la capacité théorique de camions.

L’optimisation de la mobilisation et du déploiement des ressources

Le suivi du déploiement des ressources est très important pour l’optimisation des opérations d’entretien afin d’avoir une approche proactive plutôt que réactive. L’utilisation de l’interface cartographique de suivi des opérations aide à détecter ce type d’anomalie permettant d’être proactif.

La consultation de l’interface cartographique en temps réel apporte des éléments d’information, notamment sur les décalages d’intervention des véhicules d’entretien. Cette veille s’avère particulièrement efficace, par exemple, lorsqu’une absence d’intervention pour un circuit de déneigement est détectée. Le personnel du CIM entre alors en contact avec le responsable des opérations pour s’informer des motifs justifiant cette situation et tenter de lui venir en aide. L’objectif de ce type d’intervention est d’offrir aux usagers de la route un niveau de service uniforme sur l’ensemble du réseau routier. Grâce à la vue d’ensemble ainsi obtenue, l’organisation peut conserver la maîtrise de la situation.

L’optimisation des stratégies d’épandage

Un outil a été mis au point pour offrir un support à l’évaluation de l’épandage de matériau à effectuer, tant sur le plan de la quantité que sur la proportion de fondants et d’abrasifs. Basée sur un programme d’intelligence artificielle (réseau de neurones), l’application a effectué son apprentissage en assimilant une multitude de cas réels et propose en fonction de certains paramètres météoroutiers préalablement spécifiés la proportion des types de matériaux, la quantité à épandre en tonnes par kilomètre en associant un indice de confiance à cette suggestion.

L’optimisation de l’utilisation des sels de voirie

La mise en valeur des données de télémétrie véhiculaire, météorologiques, du modèle de gestion des stratégies d’épandage et de l’apport du CIM entraîne nécessairement une gestion plus efficace des sels de voiries en permettant d’intervenir au bon endroit et au bon moment.

De plus, la connaissance de la concentration totale des fondants appliqués sur le réseau durant toute une saison permettra de mieux évaluer l’impact de ces matériaux sur des points plus sensibles du milieu et, lorsque requis, d’évaluer les mesures d’atténuation à implanter pour réduire les impacts environnementaux.

La prospection

Un nouveau type de collecte de données d’état de surface et d’adhérence

Depuis peu, la Direction de l’Estrie se tourne vers des technologies sans fil et plus particulièrement vers des instruments basés sur le principe de télédétection. Tout en offrant une information complète (température et humidité de l’air, température de la surface de la chaussée, état de surface et estimation du niveau d’adhérence de la chaussée), ces unités de mesure sont peu encombrantes. Elles ne requièrent donc aucune installation lourde et peuvent être occasionnellement déplacées d’un point à un autre lorsque l’organisation routière le souhaite. De plus, le système qui supporte ces données offre des fonctions qui permettent de paramétrer des seuils d’alertes. Ces alertes peuvent être transmises sur une pagette, sur un téléphone intelligent ou par courriel.

Une application permet d’avoir accès aux données en temps réel, tout en disposant d’une image de la chaussée visée, grâce à la présence d’une caméra de qualité.

Une version de ce type d’instrument a également été fixée sur un véhicule, offrant ainsi le même type d’information sur un itinéraire. Cette formule fournit de précieux renseignements à l’occasion des patrouilles de surveillance permettant ainsi de déterminer et de caractériser les sections de routes plus propices à la dégradation des conditions de circulation.

Une nouvelle approche de mesure préventive

La connaissance dont dispose le CIM relativement au suivi des événements météoroutiers a permis d’instaurer une nouvelle approche de mesure préventive et d’avoir recours à des techniques d’antigivrage. Des matériaux liquides sont épandus sur la chaussée avant l’événement météoroutier (par exemple pour le risque de formation de glace noire) et leurs actions, dans des conditions météoroutières prédéterminées, assurent le maintien du niveau de sécurité sur les voies de circulation avant l’arrivée des ressources pour effectuer les opérations curatives traditionnelles.

Les retombées

En 2010, nous sommes en mesure de confirmer les retombées bénéfiques suivantes :

  • Mise en production de deux centres intégrés de monitoring, soit en Estrie et à Québec;
  • Normalisation d’une plateforme de télémétrie véhiculaire;
  • Déploiement de la télémétrie véhiculaire et transmission de la donnée pour un parc de véhicules dépassant les 300;
  • Normalisation d’un flux de données par une trame XML;
  • Rédaction d’une clause technologique à intégrer aux contrats en viabilité hivernale;
  • Traçabilité des matériaux fondants appliqués sur le réseau routier, intrant important pour mesurer les impacts environnementaux;
  • Expérimentation de nouvelles pratiques, d’antigivrage et de sel prétrempé en réserve;
  • Implantation réussie d’un nouveau concept de route blanche;
  • Analyse des données de télémétrie dans le cadre du renouvellement d’un contrat pour mieux cibler les exigences contractuelles en fonction de la réalité du terrain;
  • Recherche en cours pour permettre le passage d’une modélisation descriptive à une modélisation normative (capitalisation de la donnée).

Sur la toile

https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/plan-daction-2023-2026-en-matiere-de-securite-sur-les-sites-de-travaux-routiers-des-milieux-plus-securitaires-pour-les-travailleurs-en-chantier-routier-49256
4 juillet 2023

MTMD

https://aqtr.com/association/actualites/revue-routes-transport-edition-printemps-2023-est-disponible
4 juillet 2023

AQTr

https://aqtr.com/association/actualites/deposez-votre-candidature-devenez-membre-comites-techniques-groupes-detude-lassociation-mondiale
4 juillet 2023

AQTr