Mise sur pied d’un centre de mobilité durable à Sherbrooke

Dimanche 21 mars 2010
Mobilité durable, Mobilité durable
Centre de mobilité durable
Laurent Chevrot
Directeur général adjoint
Société de transport de Sherbrooke

Le conseil d’administration de la Société de transport de Sherbrooke (STS) a reconnu en janvier 2006 que le transport public doit être intégré dans une approche globale et cohérente afin de jouer pleinement et efficacement son rôle.

La mobilité et l’accessibilité ne peuvent se créer sans la présence d’un « réseau ». Il a alors été recommandé que Sherbrooke innove en mettant sur pied un Centre de mobilité durable qui aurait pour défi de créer un modèle de développement urbain, efficient, solidaire et respectueux de l’environnement.

En avril 2008, sous la présidence du maire Jean Perrault, une « Politique de mobilité et de transport durables » a été approuvée, aux assises annuelles de l’Union des municipalités du Québec (UMQ). Le ministère des Transports du Québec (MTQ) a quant à lui diffusé les modalités d’application du « Programme d’aide gouvernementale aux modes de transport alternatifs à l’automobile ». Ces deux évolutions du contexte québécois ont alors permis de concrétiser le dossier et ont agi comme un déclic.

La STS et la Ville de Sherbrooke ont ensuite élaboré un plan d’affaires pour le futur Centre de mobilité durable, pour répondre aux critères d’éligibilité demandés par le MTQ.

Des objectifs ambitieux pour une nouvelle structure

Le Centre de mobilité durable de Sherbrooke assure la coordination des actions visant à développer des actions de mobilité durable. Par le biais d’actions de promotion, de sensibilisation et de planification, il permet de favoriser les dynamiques de mobilité durable à Sherbrooke et, par extension, exerce un impact sur l’ensemble de la région de l’Estrie.

Le Centre bénéficie de la mise à disposition de ressources financières proposées en parts égales par les deux structures porteuses du projet, la STS et la Ville de Sherbrooke et, bien sûr, d’une subvention de la part du ministère des Transports.

Même si le Centre de mobilité durable de Sherbrooke de la subvention accordée pour la mise en place d’un Centre de gestion des déplacements (CGD), il se distingue fortement de ces derniers. Là où les CGD ont principalement pour mission d’offrir des conseils en mobilité à des organismes, des entreprises ou des administrations, le Centre de mobilité durable souhaite se positionner comme un lieu de convergence pour la prise en compte concertée de l’ensemble des composantes de la mobilité durable, de l’aménagement urbain au fonctionnement des différents modes de transport.

Ce positionnement et la portée des travaux à réaliser ont influencé le choix de la forme juridique retenue et, contrairement aux CGD, qui sont principalement des organismes sans but lucratif (OSBL), le Centre de mobilité durable prend la forme administrative d’un comité mixte entre la Ville et la STS.

Les objectifs du Centre de mobilité durable sont par ailleurs très ambitieux, puisqu’ils répondent aux objectifs fixés par le ministère des Transports du Québec et par l’Union des municipalités du Québec, dont l’énoncé de vision préalable à la politique de mobilité et de transport durables est la suivante :

« le présent engagement du monde municipal vise le développement d’une nouvelle culture de la mobilité et du transport qui repose en particulier sur un équilibre renouvelé entre les modes de transport des personnes et des marchandises, une réduction de la dépendance à l’automobile, une amélioration de la sécurité, une accessibilité accrue à des transports collectifs abordables, disponibles et fiables, une utilisation optimale des innovations technologiques et logistiques, une diminution de la consommation énergétique, ainsi qu’une réduction des impacts environnementaux et des nuisances, dont ceux associés à l’émission des gaz à effet de serre ».

Cette vision, très volontariste, doit permettre aux municipalités québécoises de planifier leur développement, de manière efficace et respectueuse de l’environnement, et d’adopter des plans de mobilité concernant l’ensemble des services.

Cette nouvelle politique suppose la mise en place de nouveaux outils, adaptés aux objectifs de mobilité durable supposés par la vision exprimée. La création d’un Centre de mobilité durable à Sherbrooke doit permettre de répondre à ces attentes.

La création d’une structure de consultation des différentes échelles d’intervention politique, des collaborations administratives, et de conciliation, permettra de faire converger les objectifs des différents acteurs et de mettre en perspective les politiques d’urbanisme, de circulation, de transports actifs, de transports collectifs et de développement durable.

L’ensemble de ces politiques, citées précédemment, doit constituer la politique de mobilité durable qui va déterminer le cadre des politiques sectorielles et en assurer la cohérence.

Enfin, et c’est ce qui rapproche le Centre de mobilité durable de Sherbrooke des CGD, il pourra proposer aux différents partenaires des conseils en mobilité durable, en s’appuyant sur les ressources disponibles chez les promoteurs du Centre, que sont la STS et la Ville de Sherbrooke. Les éléments permettant d’intervenir sur les flux domicile-travail et domicile-études seront particulièrement privilégiés, de manière à favoriser les transports collectifs, les modes de transports actifs et le covoiturage.

Le fonctionnement du centre de mobilité durable

La STS a la responsabilité de l’ensemble des transports collectifs sur le territoire de la ville de Sherbrooke. À ce titre, elle joue un rôle majeur de gestionnaire de mobilité. De plus, les transports en commun sont aujourd’hui considérés comme la pierre angulaire de la mobilité durable, par leurs possibilités de déplacements massifs et leurs impacts en matière de structuration de territoire et d’émissions globales de gaz à effet de serre.

La mobilité est perpétuellement en évolution et les derniers changements montrent une limite de plus en plus floue entre les transports collectifs et individuels, les vélos en libre-service ou les transports à la demande. Ces modes ne sont que les premiers modes « mixtes » à apparaître.

Le rôle de la STS, par le biais de ses partenariats multiples (Université de Sherbrooke, cégep de Sherbrooke, Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke –CHUS, etc.) et en raison des évolutions actuelles et prévisibles de la mobilité, doit donc évoluer et se renforcer dans ses caractéristiques de gestionnaire global de la mobilité durable.

Tout ce travail n’a de sens que s’il est coordonné avec les services de la Ville qui ont la responsabilité de l’aménagement urbain, des infrastructures, du développement économique et de la gestion du stationnement.

Le Centre de mobilité durable permettra d’adapter les compétences et les missions aux nouveaux enjeux de la mobilité durable.

Au binôme Ville-STS s’ajoute un réseau de partenaires dont l’implication va garantir la réussite de la démarche.

Le rôle des partenaires consiste à faire valoir leurs préoccupations et leurs enjeux relatifs à la mobilité durable, à contribuer aux groupes de travail thématiques du Centre de mobilité durable et à participer à la mise en oeuvre des actions de sensibilisation et de communication du Centre.

Les partenaires identifiés ont été regroupés dans plusieurs secteurs d’activité : Santé et emploi, Éducation, Associations et comités de la ville et Transporteurs. Ces secteurs regroupent l’ensemble des intervenants ayant un impact sur la mobilité à Sherbrooke, soit une quarantaine d’organismes, ainsi que des partenaires aussi diversifiés que l’Université de Sherbrooke, le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, Sherbrooke Innopole, Transdev-Limocar et Communauto…

La structure organisationnelle du Centre de mobilité durable est la suivante : un comité de pilotage, un comité de gestion et un coordonnateur.

Le comité de pilotage est composé des élus municipaux présidents des comités touchant à l’urbanisme, à la circulation, aux transports actifs, du président de la STS, des hautes directions de la STS et de la Ville, du directeur territorial du ministère des Transports du Québec, de la haute direction de la Conférence régionale des élus de l’Estrie et d’un représentant par secteur des partenaires. Le rôle du comité de pilotage consiste à définir les enjeux du Centre de mobilité durable, à établir les orientations et les objectifs et à proposer au conseil municipal et au conseil d’administration de la STS les recommandations du Centre de mobilité durable.

Le comité de gestion et le coordonnateur s’assurent de faire fonctionner le Centre de mobilité durable, d’effectuer le suivi et de veiller à la réalisation des actions.

Les actions prévues dans le plan d'affaires

Le Centre de mobilité durable doit permettre de mener des actions intéressant l’ensemble des modes de transport (transports collectifs, transports actifs, voiture, etc.) et de définir des politiques communes.

Les enjeux liés aux modes de transport assurant la desserte du territoire en provenance de l’extérieur seront pris en compte.

L’ensemble des modes de transport internes au territoire, ou entrant dans celuici, sera étudié dans des perspectives d’intermodalité (chainage des déplacements) et de multimodalité (emploi alternatif de différents modes de transport).

Plusieurs types d’actions sont planifiés pour le Centre de mobilité durable.

La réalisation d’un plan de mobilité durable, démarche inspirée des démarches européennes de plans de déplacements urbains (PDU), constitue le coeur du processus de planification de la mobilité durable.

Cet exercice permettra de définir les orientations d’aménagement, d’urbanisme, de planification des transports en commun et des transports actifs, dans un cadre unique et concerté, qui garantira la prise en compte des enjeux de mobilité durable.

Ce type de démarche aboutit généralement à la réalisation d’un Plan précisant les orientations qui vont s’appliquer à la définition des politiques sectorielles et à sa déclinaison opérationnelle, sous forme de fiches d’actions.

À la suite de la réalisation d’un Plan de mobilité durable, il sera possible pour la Ville de réaliser les différents types de planification sectorielle. Il est important de noter que cette démarche de plan de mobilité durable ne vient pas remplacer les plans sectoriels, mais devient un intrant de référence permettant de les développer à partir des besoins du milieu dans le domaine.

Cette démarche vise à favoriser l’utilisation des modes de transport alternatifs à la voiture particulière, elle est donc compatible avec le programme de subventions associé du ministère des Transports du Québec.

La durée de validité de ce Plan de mobilité durable devrait être de 10 ans, avec une révision au terme des cinq premières années de mise en oeuvre.

L’organisation d’un forum sur la gestion de la mobilité durable dans les villes moyennes, d’actions de sensibilisation et de formation, et de conseils en mobilité durable viendra compléter cette démarche.

L’une des principales contraintes pour le transfert modal est constituée par la difficulté de rassembler toutes les informations liées à la mobilité durable.

Le Centre de mobilité durable va enfin soutenir la création d’un site Internet reprenant l’ensemble des modes de transport alternatifs à la voiture particulière et regroupant toutes les informations importantes, par le biais de cartographies thématiques et d’un planificateur d’itinéraires multimodal.

Le site Internet comprendra également un extranet afin de soutenir les actions du Centre. Il fera appel aux nouvelles technologies pour favoriser notamment le travail collaboratif et la diffusion des informations aux partenaires.

Conclusions et perspectives

Dans un contexte nord-américain très favorable à l’automobile, il est parfois difficile de favoriser les décisions et les pratiques compatibles avec les enjeux de mobilité durable.

Cette constatation est encore plus vraie dans les villes moyennes, qui ne « bénéficient » pas de la congestion ou de la rareté des stationnements pour soutenir des politiques de mobilité durable. Pour tenter de contrer ce rapport de force très favorable à l’automobile, le Centre de mobilité durable de Sherbrooke représente une solution innovante, qui va bénéficier de l’apport de nombreux partenaires et d’une démarche concertée de planification de la mobilité durable.

Le changement de culture et les décisions qui vont découler de cette démarche auront un impact qui se fera ressentir à court, moyen et surtout long termes.

Sur la toile

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