La gestion des ponceaux au ministère des Transports du Québec
Un ponceau est un ouvrage d’art sous remblai permettant la circulation d’eau sous le réseau routier. Les usagers de la route ont rarement conscience de la présence de ces infrastructures, mais la défaillance d’un ponceau, même de petite taille, peut représenter un risque sérieux pour l’usager et compromettre la fonctionnalité du réseau routier. Les ponceaux font donc partie des infrastructures dont le ministère des Transports du Québec (MTQ) doit assurer une gestion optimale. Pionnier dans le domaine de la gestion des ponceaux, le MTQ a mis sur pied un programme de gestion en 2003 couvrant les ponceaux dont l’ouverture est supérieure ou égale à 300 mm et inférieure à 3 000 mm. Ce sont près de 60 000 unités sous les routes du MTQ qui sont incluses dans ce programme.
Afin de favoriser de meilleures pratiques de gestion et d’avoir une vision cohérente de cet actif, la boucle de gestion des ponceaux a été développée et est présentée à la figure 1. Les divers éléments de cette boucle seront abordés successivement en commençant par la première étape de la gestion d’un actif, l’inventaire.
1. L’inventaire des ponceaux
Depuis 2007, le MTQ a géolocalisé tous les ponceaux présents sur le réseau et les a répertoriés dans un système d’inventaire dans lequel les ponceaux sont d’abord répartis selon deux grandes catégories, soit les ponceaux rigides et les ponceaux flexibles. Plus spécifiquement, les structures rigides regroupent les ponceaux en béton armé ou non, en acier rigide, en pierres et en bois alors que les structures flexibles regroupent, entre autres, ceux en tôle ondulée et en polyéthylène. Ainsi, le Ministère compte présentement 26 différents sous-types de ponceaux, allant du circulaire en béton jusqu’au voûté en maçonnerie, comme le montre la figure 2.
2. Programme d’inspection
Afin d’assurer la sécurité des usagers de la route, un suivi de l’état des ponceaux est nécessaire. Le MTQ s’est doté d’un processus de qualité qui englobe la formation, l’accréditation, l’inspection et l’audit du processus d’inspection. Annuellement, les inspecteurs réalisent plus de 12 000 inspections de ponceaux.
2.1. Processus d’inspection
Chaque inspecteur effectue une inspection selon les indications du Manuel d’inspection des ponceaux, publié aux Publications du Québec en juin 2012 (figure 3). Ce dernier aborde divers sujets, dont l’inventaire, la procédure d’inspection, les pratiques sécuritaires, la fiche et la grille d’inspection. Cette grille présente 17 critères qui permettent à l’inspecteur d’évaluer la nature des défauts, puis l’étendue et la sévérité de ceux-ci. Par la suite, ces défauts sont inscrits dans une fiche, puis compilés dans le système ministériel d’inspection des ponceaux.
Les données recueillies sont traitées par un algorithme qui permet d’automatiser le calcul d’un indice d’état du ponceau (IEP). Afin de mieux catégoriser l’état des ponceaux, l’IEP est divisé en 5 classes de A à E, comme le précise le tableau 1. Ces classes permettent ensuite de déterminer les ponceaux qui nécessitent des travaux à court terme.
Les ponceaux sont inspectés selon une fréquence qui leur est propre. Cette fréquence tient de l’état du ponceau, du sous-type, de sa géométrie, de sa localisation géographique et de certains critères spécifiques. Plus la défaillance d’un ponceau peut engendrer un impact majeur pour les usagers, plus le ponceau sera inspecté fréquemment.
Les résultats d’inspection permettent de compiler un bilan annuel à partir duquel les stratégies d’investissement, les priorités d’intervention et la programmation des travaux sont développées. La qualité des données d’inspection étant primordiale, le MTQ s’est doté d’un processus d’assurance de la qualité des données qui inclut la formation d’inspection et l’audit du processus d’inspection.
2.2. Formation d’inspection des ponceaux
La qualité des inspections et la fiabilité des données commencent par la formation adéquate des inspecteurs. Pour ce faire, le MTQ forme plus d’une centaine d’inspecteurs de ponceaux, chaque printemps, selon les lignes directrices du Manuel d’inspection des ponceaux.
La formation de deux jours présente plusieurs exemples concrets de types de ponceau et de défauts ainsi qu’une multitude d’exercices permettant aux apprenants de mettre en pratique la matière au fur et à mesure que celle-ci est assimilée. Tout au long de la formation, des discussions de groupe ont lieu afin d’uniformiser l’interprétation des critères d’inspection chez l’ensemble des participants. À la suite de la formation, l’inspecteur de ponceaux doit réussir un examen pour obtenir une accréditation lui permettant de réaliser des inspections de ponceaux pour le MTQ. Cette accréditation est valide pour trois ans. Les inspecteurs doivent par la suite suivre une formation de réaccréditation d’une demi-journée dans laquelle l’accent est mis sur la grille d’inspection et sur les mises à jour du programme d’inspection. Ce processus permet aux inspecteurs d’actualiser leurs connaissances.
Le MTQ offre aussi une journée de formation in situ. Celle-ci fait suite à la formation théorique et permet aux inspecteurs nouvellement accrédités de mettre en pratique les connaissances acquises.
2.3. Audits du processus d’inspection
La qualité des données recueillies est validée par un audit du processus d’inspection des ponceaux. Annuellement, le MTQ audite quelques directions territoriales afin de valider la compréhension des critères d’inspection.
Lors de l’audit, les auditeurs inspectent un échantillonnage de ponceaux. Cet échantillonnage est aléatoire, mais demeure diversifié et représentatif de l’inventaire de la direction territoriale. Les inspections sont comparées à la fiche d’inspection consignée au système et les observations des auditeurs sont discutées sur le terrain avec les inspecteurs afin que ceux-ci aient une rétroaction immédiate des points à améliorer. Ensuite, les résultats sont compilés, puis présentés aux autorités. À la suite des constats et des recommandations des auditeurs, les directions territoriales doivent produire un plan d’action afin d’optimiser la gestion des ponceaux sur leur territoire.
Les audits constituent aussi une occasion unique de proposer des améliorations potentielles au programme d’inspection des ponceaux. Les améliorations apportées à la formation d’inspection des ponceaux découlent directement des résultats d’audits et des discussions sur le terrain avec des inspecteurs locaux.
3. Programmation et travaux
Chaque année, le MTQ investit plusieurs millions en reconstruction (figure 4) et en amélioration de ponceaux. C’est pourquoi il est indispensable de définir une stratégie d’investissement pour ces ouvrages. Afin de bien investir les montants alloués à l’actif de ponceaux, une analyse de l’ensemble des données est réalisée et consignée dans un bilan annuel. Selon les résultats, le budget est réparti là où les besoins l’exigent. La programmation des travaux est l’étape suivante de la boucle de gestion. Celle-ci respecte la stratégie d’investissement.
À la suite de l’inspection d’un ponceau, l’inspecteur consigne ses recommandations d’interventions au système d’inspection, qui sont ensuite transmises au système de gestion des besoins, où tous les besoins en exploitation du MTQ sont gérés. Ce système permet aussi d’obtenir une évaluation des coûts engendrés par les interventions. La gestion des priorités est ensuite réalisée selon l’état des ponceaux et du montant alloué à cet actif.
Le MTQ produit une Stratégie d’intervention intégrée visant à investir stratégiquement dans le « bon ouvrage au bon moment et avec la bonne technique » pour maintenir les actifs en bon état et assurer la sécurité du réseau et des usagers grâce à une planification optimale des interventions. La stratégie des ponceaux est orientée autour de deux objectifs principaux, soit la réduction du nombre de ponceaux nécessitant des travaux et le maintien en état du parc par des interventions adéquates.
Plus spécifiquement, la réduction du nombre de ponceaux nécessitant des travaux relève de deux priorités. D’abord, dans un souci de gestion efficace des ressources, il faut s’assurer d’intervenir sur les ponceaux nécessitant des travaux sous des projets routiers programmés. La seconde priorité est d’intervenir sur les ponceaux nécessitant des travaux, peu importe leur localisation.
Une fois les montants connus, les priorités analysées et la programmation complétée, la réalisation des travaux se fait en régie ou sous contrat. Lorsque les travaux sont terminés, l’inventaire ainsi que l’état sont actualisés, ce qui boucle le cycle de gestion de l’actif de ponceaux.
Conclusion
Le ministère des Transports du Québec a réussi ces dernières années à maîtriser la boucle de gestion de l’actif de ponceaux. Les efforts investis en ressources humaines et financières ont permis au MTQ d’être un leader dans le domaine. Afin de maintenir son leadership, le Ministère reste proactif et continue d’apporter des améliorations aux divers éléments de la boucle. De cette manière, le MTQ réalise une gestion optimale de son actif et s’assure de la sécurité des usagers de la route.