Repérer les secteurs difficiles à déneiger avant même que la route n’existe…

Mercredi 21 décembre 2011
Viabilité hivernale
Microclimats
Hardy Bengt Granberg
Professeur
Université de Sherbrooke - professionnels
Étienne Morin
Président
Vision Météo

Cet article décrit les applications des principes d’interprétation des microclimats et d’analyse de l’environnement routier en tout point d’un réseau, pour être en mesure d’établir la fréquence des risques d’événements météoroutiers. Une telle approche combinée aux technologies de l’information permet d’aboutir à des indicateurs pour l’entretien hivernal du réseau routier.

La conception de nouvelles infrastructures routières fait toujours référence à des études d’impact pour l’optimisation des coûts de réalisation, pour le minimum d’empreinte sur le milieu naturel et pour la meilleure intégration possible dans l’environnement social. Imaginez maintenant que, parmi ces études d’impact, il soit possible d’identifier les secteurs difficiles à contrôler dans le cadre des opérations d’entretien hivernal et que les zones de poudrerie, par exemple, soient localisées de façon très précise. Plus encore, imaginez que la conception des aménagements routiers soit influencée de façon à ne pas aggraver l’intensité des phénomènes météo-routiers à l’origine de problème d’entretien hivernal. En réalité, cette approche a déjà été utilisée et appliquée dans des projets de conception routière.

De quelle façon peut-on prévoir les difficultés d’entretien hivernal sur une route encore inexistante ? Comment peut-on réaliser une telle étude d’impact alors qu’il est déjà difficile, dans certaines circonstances, d’anticiper des phénomènes semblables sur un réseau routier existant et bien connu des services d’entretien ? La tâche est réalisable, car la conception de nouvelles routes concerne bien souvent des sections de quelques kilomètres seulement, et que de nombreuses données géographiques, très précises, sont disponibles au moment des travaux de conception.

Cette approche innovante présente de nombreux avantages puisqu’elle permet de faire des recommandations pour ne pas créer de véritables pièges à neige ou des points encore plus froids sur lesquels des glaces routières y seront fréquentes. De plus, lorsque des mesures d’atténuation sont trop coûteuses ou irréalisables, l’identification des secteurs difficiles à entretenir va permettre aux organisations routières de faire le choix d’une stratégie de surveillance et assurer ainsi la sécurité des usagers dès la mise en service du tronçon routier. Des capteurs spécifiques aux problématiques du secteur peuvent également être installés en des endroits appropriés pour en optimiser la surveillance et réduire les effets de surprise. La localisation des secteurs difficiles sert également à constituer des points de validation des surveillants qui se rendront en premier dans ces secteurs à l’occasion de leur patrouille et assureront un suivi encore plus efficace de la dégradation des conditions de circulation.

C’est donc à partir de l’analyse des données de l’environnement de la route projetée que les phénomènes météo-routiers sont évalués, en tout point, puisque c’est l’environnement routier qui agit de façon importante dans l’atténuation ou l’accentuation des conditions météorologiques. Les gestionnaires de réseaux routiers savent que, pour un même événement météo, les impacts sur le réseau sont très différents d’un endroit à un autre, dans la majeure partie des cas. L’analyse d’un bulletin météo permet d’avoir une idée générale de la situation qui peut survenir, mais c’est avant tout la connaissance du territoire à entretenir et la patrouille qui vont donner de réelles indications sur les risques de glissance ou de perte de visibilité.

Les données disponibles au moment de la conception de la route sont très nombreuses et précises compte tenu de l’ampleur des travaux et des multiples études d’impact qui sont réalisées dans le cadre de la conception de la route. Ainsi, en utilisant les technologies de l’information, il est possible de récupérer les données pertinentes à la météo routière et de les intégrer à des indicateurs cartographiques à partir des paramètres les plus importants, comme :

  • les variations d’altitude pour la répartition des températures;
  • les éléments topographiques qui influencent la direction des vents;
  • la couverture des sols qui a un impact sur la vitesse des vents;
  • les secteurs propices à l’humidité et aux condensations de surface;
  • les niveaux de dénivellation entre la surface de la route et les emprises pour intégrer les différences notables en durée d’ensoleillement.

Cette approche d’analyse de l’environnement routier fait appel à une application des connaissances en micro climatologie et apporte un intrant très intéressant pour les mesures d’atténuation à prévoir au moment de la conception des routes. Elle s’intègre parfaitement à la mouvance actuelle en viabilité hivernale. En effet, le ministère des Transports du Québec a officiellement déposé sa stratégie de gestion environnementale des sels de voirie en octobre 2010 à l’occasion du congrès de viabilité hivernale de l’AQTR. Celle-ci encourage les organisations routières à produire des plans d’action afin de gérer de façon responsable le cycle d’utilisation des sels de voirie, entre autres au moment de l’épandage des déglaçants. Dans le contexte d’analyse des microclimats, les mesures d’atténuation, en plus de réduire les coûts d’entretien et les risques reliés à la sécurité des usagers, contribuent à une gestion responsable des sels de voirie. En choisissant des solutions alternatives minimisant les risques de phénomènes météo-routiers accentués ou en ayant une bonne connaissance des secteurs difficiles à entretenir, les administrations routières contribuent indirectement, et dans certains cas fortement, à la réduction de l’usage des sels de voirie.

L’analyse microclimatologique ouvre également des horizons intéressants à explorer pour le réseau routier déjà existant. Une analyse de la sorte est directement applicable à des tronçons stratégiques ou connus pour leurs difficultés d’entretien. Des indicateurs sont alors conçus à partir des résultats d’analyse microclimatique et constituent alors des informations précieuses à intégrer dans un système d’aide à la décision ou dans un processus d’amélioration des procédures d’intervention, car seule la connaissance des impacts de la météo sur la diversité des environnements routiers permet de dimensionner les risques météo-routiers en tout point d’un réseau. Lorsque cette connaissance est acquise, même partiellement, grâce aux technologies de l’information, il est alors possible d’établir, de façon pertinente, des informations adaptées aux conditions météo-routières actuelles pour l’aide à la décision, l’optimisation de la gestion des ressources et la mesure de performance des interventions.

Sur la toile

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https://www.quebec.ca/nouvelles/actualites/details/plan-daction-2023-2026-en-matiere-de-securite-sur-les-sites-de-travaux-routiers-des-milieux-plus-securitaires-pour-les-travailleurs-en-chantier-routier-49256
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