Définir la voie d’avenir en transport urbain collectif

Vendredi 19 janvier 2018
Mobilité durable, Technologie, Mobilité durable
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Yves Provencher
Directeur Transport et énergie
FPInnovations

La conscientisation environnementale a amené la population mondiale, au cours des dernières années, à mieux repenser son empreinte écologique et à poser les gestes nécessaires pour réduire les sources de pollution. Parmi les différentes options préconisées par les milieux urbains, le transport en commun s’inscrit comme une approche simple et efficace pour réduire les gaz à effet de serre, par une diminution de la consommation de carburant de source automobile. Toutefois, une partie de la population est toujours réticente à adopter les modes de transport collectif.

Les besoins en mobilité de personnes ne cessent de croître. Toutefois, une mobilité accrue ne veut pas nécessairement dire plus de voitures : la congestion dans les villes affecte grandement la mobilité des individus et des biens, en plus d’être une source majeure de pollution. La solution semble plutôt résider dans la diminution du nombre de voitures et, pour atteindre un tel objectif, des options efficaces, économiques et attrayantes doivent être mises à la disposition des utilisateurs.

REPENSER LA MOBILITÉ URBAINE 

Depuis quelques années, la popularité du transport en commun stagne, voire est en perte de vitesse un peu partout en Amérique du Nord. Toutes les grandes villes canadiennes ont vu leur taux d’achalandage décroître ou stagner dans le meilleur des cas (figure 1 en couverte : Utilisation globale annuelle des transports collectifs pour différentes villes canadiennes. Source : https://www.theglobeandmail.com/news/politics/drop-in-transit-ridership-has-officials-across-canadastumped/article30178600/). Le phénomène est le même aux États-Unis, où des baisses d’achalandage allant jusqu’à 11 % ont été notées de 2015 à 2016 (p. ex. Austin, Washington) (tableau 1).

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Tableau 1. Écart d’utilisation des transports collectifs pour différentes villes américaines. Source : http://usa.streetsblog.org/2017/02/24/transit-ridership-falling-everywhere-but-not-in-cities-with-redesigned-bus-networks/

De nombreuses hypothèses sont avancées pour expliquer ce déclin : prix du carburant trop faible, compétition venant de services comme Uber, popularité croissante du vélo, etc. Pour contrer ce phénomène, on investit massivement dans les systèmes de transport rapide par bus ou de trains légers sur rail, mais rien n’y fait. À titre d’exemple, la ville de Los Angeles (Californie), qui a investi des milliards de dollars dans un nouveau train léger sur rail, a quand même vu son achalandage baisser de 7,6 % au cours de la dernière année.

Bien sûr, toute statistique présente des exceptions. Ainsi, dans le cas des transports collectifs, certaines villes ont vu leur achalandage augmenter. Attardons-nous donc sur ce qui les caractérise.

Houston, au Texas, une ville pétrolière par excellence (essence à 1,80 $/gal au moment d’écrire ces lignes), a connu un accroissement de son achalandage de 6,8 % entre 2015 et 2016, et ce, après des années de décroissance. Pour y arriver, les autorités ont complètement revu leur réseau pour passer d’un système de plaques tournantes (hub and spokes system) à un système de réseau (grid) mieux adapté à son environnement. On a aussi offert des horaires plus flexibles, en plus d’étendre le service les soirs et fins de semaine. Le service d’autobus a vu son achalandage croître d’un modeste 1,2 %, alors que la plus forte augmentation, soit 16 %, a été enregistrée pour le train léger sur rail. Selon Kirk Hovenkotter, coordonnateur national chez TransitCenter, la situation s’explique par le fait que Houston desservait une ville qui n’existe plus, soit une ville où les gens travaillent de 9 h à 17 h. La ville de Seattle (Washington) a procédé à des changements similaires, étape par étape, tout en améliorant la connectivité de son service entre les divers modes. Elle a aussi réussi à arrêter l’hémorragie et a vu son achalandage augmenter dans la dernière année.

Comme le prouvent ces exemples, il faut, pour raviver l’achalandage dans le transport en commun, penser multimodalité, connectivité et surtout flexibilité. Le concept du premier et du dernier kilomètre est aussi excessivement important dans le choix du mode de transport. Comme on le constate, l’attrait pour l’utilisation du véhicule personnel demeure très élevé, si l’usager doit emprunter sa voiture pour rejoindre le service de transport en commun ou si ce dernier le dépose trop loin de sa destination; plusieurs personnes privilégieront alors le fait de prendre leur véhicule personnel pour tout le trajet.

LE PRINCIPE DU PREMIER ET DU DERNIER KILOMÈTRE

On attribue cette situation au manque de solutions de transport pour le premier et le dernier kilomètre. En effet, il est primordial d’offrir une solution attrayante et efficace pour convaincre le passager éventuel d’abandonner son véhicule personnel.

Différentes grandes agglomérations tentent de dissuader les automobilistes d’accéder aux centres-villes avec leur véhicule, voire de carrément laisser leur voiture à la maison; Londres est sans doute l’exemple le plus frappant avec son système de péage pour accéder au centre-ville. Tous s’entendent toutefois sur le fait qu’on ne peut limiter l’accès aux centres-villes sans offrir de solutions de rechange adéquates et attrayantes pour convaincre les automobilistes à abandonner leur voiture. Il est permis de croire qu’il s’agit de l’occasion rêvée et qu’il ne faut pas la rater. En effet, l’arrivée des voitures autonomes modifiera complètement la manière dont les automobilistes envisageront le temps de déplacement. Si un individu peut vaquer à d’autres occupations durant son trajet, dans le confort de sa voiture, ceci pourrait s’avérer une grande concurrence au transport en commun, selon certains.

Rien ne porte à croire, toutefois, que cette place reviendra d’emblée au véhicule autonome individuel. En effet, la congestion qui s’ensuivrait, ainsi que le coût de telles voitures individuelles, pourraient décourager la majorité des voyageurs. La solution se trouvera plutôt dans un véhicule partagé, qui est plus durable et économique.

PLACE À LA MOBILITÉ URBAINE CONNECTÉE 

L’utilisation du transport en commun doit être repensée pour répondre aux nouvelles attentes de la clientèle potentielle. Les méthodes de mobilité collective se doivent d’être valorisées et optimisées pour désengorger les réseaux routiers et surtout améliorer la qualité de vie des citoyens. On remarque d’ailleurs une hausse de popularité du transport en commun là où des solutions multimodales plus flexibles sont mises en place.

Une autre considération importante à la réussite du projet est l’adaptation du mode de transport aux conditions climatiques qui prévalent, c’est-à-dire un système de transport autonome et connecté quatre-saisons, de manière à permettre aux usagers d’obtenir le même confort et le même niveau de services, et ce, quelles que soient la saison et les conditions climatiques.

UN PROJET NOVATEUR EN MOBILITÉ ÉLECTRIQUE À MONTRÉAL 

Récemment, la région de Montréal est devenue le centre d’un projet de solution en mobilité urbaine connectée, quand un groupe de partenaires majeurs a fait l’annonce d’un projet de collaboration pour la conception de véhicules électriques automatisés. Rassemblant Groupe PIT de FPInnovations, ABB Inc., Ericsson Canada inc., Motrec International inc. et Technoparc Montréal, le groupe de partenaires prévoit la conception, le développement, la production et la commercialisation d’une solution de mobilité urbaine connectée complémentaire aux systèmes de transport collectif existants et adaptée aux conditions hivernales rigoureuses d’ici.  

La solution envisagée est composée d’une navette autonome et connectée à l’ensemble de l’offre de transport pour en faire un mode de déplacement efficace. Le système envisagé répondra au concept MaaS (Mobility as a Service), un modèle mise sur la complémentarité de tous les moyens de transport en les combinant. Le concept rassemble des options de différents fournisseurs de services de transport en un seul service mobile, éliminant du même coup les problèmes de planification et fonctionnant selon un paiement unique.

Le système montréalais sera conçu par des entreprises québécoises qui connaissent les conditions des hivers ici et qui sauront tenir compte des caractéristiques qui composent la population, en termes de géographie, de démographie, etc. Entre autres, il faut pouvoir tenir compte du vieillissement de la population et répondre aux besoins de personnes dont la mobilité pourra être plus exigeante, tout en s’adaptant à une population jeune et dynamique qui n’hésite pas à utiliser le vélo, même dans des conditions de neige abondante. Le concept est prévu pour être exportable vers d’autres environnements urbains.

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Figure 2. Schématisation des différents moyens de transport composant la mobilité urbaine. Source : http://telematicswire.net/mobility-as-a-service-maas-launches-first-on-demand-mobility-service-in-finland/

UNE SOLUTION ADAPTÉE À L'AVENIR

La solution de transport urbain est composée d’une navette autonome et connectée à l’ensemble de l’offre de transport, pour en faire un mode de déplacement efficace (figure 2). Intégrée dans un concept MaaS à l’ensemble des services de transport en commun d’une région, la navette pourra être synchronisée avec les autres offres de transport en mode multimodal ou appelée, sur demande, par téléphone intelligent. Ainsi, ce système de micro-transit alimenterait les systèmes de transport plus lourds tels que les autobus, trains et métro.

Le véhicule développé dans le cadre du projet montréalais sera le seul véhicule de ce genre qui saura circuler efficacement en conditions hivernales. Étant entièrement électrique et sans émission, les navettes pourront circuler à l’intérieur des infrastructures pour prendre et déposer des passagers. De plus, la possibilité d’offrir des navettes « signature » permettra à chaque client de personnaliser sa flotte de navettes, grâce au design modulaire du véhicule. Les opérateurs apprécieront sa polyvalence et son efficacité, grâce la recharge occasionnelle intelligente qui permettra d’optimiser le temps d’opération des navettes et de minimiser le nombre de navettes requises pour offrir un service donné.

Ville de design et de talents créatifs, de joueurs de calibre mondial dans les domaines de la vidéo, du numérique et de l’intelligence artificielle, Montréal bénéficiera d’une ouverture privilégiée pour les acteurs qui souhaiteraient contribuer à la commercialisation du projet par le biais d’une expérience client et d’une interface numérique optimale pour les usagers.

La mobilité urbaine connectée est sans contredit la voie de l’avenir pour les systèmes de transport en commun. De plus, la grande polyvalence des partenaires à la tête du projet montréalais devrait permettre de générer un environnement adapté aux conditions climatiques particulières de cette ville, tout en tenant compte des besoins de ses différents types d’utilisateurs.

Pour en savoir plus sur le projet, communiquez avec Yves Provencher, directeur, Développement des affaires – Transport, FPInnovations.

Sur la toile

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